Essais

Au large de l’Histoire

Éléments d’un espace-temps à venir

Le Livre

2015

Essai
21 x 14,8 cm
360 pages
Livre broché
ISBN 978-2-36054-161-4
Éditions Le mot et le reste, Marseille

Pendant le XIX e et le XX e siècles, on a cru, malgré tout, que l’Histoire était synonyme de Progrès. Qu’elle menait quelque part à un grand État, au communisme universel, à un Supermarché du bonheur. Personne n’a plus confiance dans l’Histoire. D’où un grand vide existentiel et culturel. Sans utopisme, sans réenchantement facile. Kenneth White entreprend une navigation hauturière dans un espace de vie et de pensée, qui a toujours existé au large de l’Histoire. Les escales de ce voyage sont au nombre de cinq : une analyse socio-politique de la fin de la modernité, une investigation qui remonte aux origines de la culture ; l’examen de diverses tentatives de refondation sociale à travers le monde ; la question, posée encore trop timidement par l’écologie, de l’habitation de la Terre, et enfin, une critique de la situation contemporaine de l’art.

Présentation de l’éditeur

Revue de presse

En deux livres jalonnant ce qui est peut-être le vrai voyage postmoderne, Kenneth White poursuit sa quête géopoétique.À tous ceux qui, partagés entre dégoût et désir, sentent plus que jamais le besoin de s’écarter, de se frayer un passage vers un monde agrandi et premier, les livres de Kenneth White sont un vrai bonheur. S’y incarnent une clairvoyance, un sens du réel, un dynamisme, qui allègent, ouvrent des espaces, proposent des voies vers une vie plus dense, un esprit plus large, un rapport au monde plus sensuel. […]
Cet essai commence par une analyse sociopolitique de l’empire de la « médiocratie » : standardisation massive, désubstantialisation de la vie alliée à une « twitterisation des esprits ». Que faire face à cette infantilisation générale ? Pour tenter de répondre à ce défi, Kenneth White dresse la cartographie complexe des événements qui ont conduit l’homme à s’isoler du reste du vivant et à se replier sur lui-même avant d’explorer ce que « l’intelligence chercheuse » – Whitman, Thoreau, Nietzsche, Segalen, Heidegger, Hölderlin, Rilke… – a déjà pu nous proposer.  « Finis les refuges auprès du Sacré, de l’Être, des essences », ou des ailleurs. Tout se joue ici et maintenant. Il s’agit d’être ouvert aux passages, d’être capable de vivre modestement hors des espaces codés. De s’inspirer des exemples du cheminement de quelques-uns, de comprendre que le chemin se fraye et s’expérimente, d’où le concept de « nomadisme intellectuel ». Il faut retrouver un sens de la perception fraîche du monde, celle des premiers voyageurs « se déplaçant sur une terre d’où la glace venait juste de se retirer ». Il est urgent de penser une géopoétique rayonnante capable de prendre la relève des récits historiques et métaphysiques épuisés. D’ouvrir des portes sur une « atopie », ce site vierge « où l’être peut sortir de lui-même et se réaliser », urgent de fonder autrement la vie humaine, de conduire l’esprit vers des territoires inédits de l’être et  une manière délivrée d’être au monde.
Richard BlinLe Matricule des Anges, n° 162, avril 2015.

Passionnant mais totalement déroutant, cet essai revisite les XIXe et XXe siècles à leur périphérie. Naviguant entre les époques et les écoles, Au large de L’Histoire est une gigantesque errance. Géographique, historique, philosophique… poétique, aussi.
Drôle d’ouvrage. Est-ce de l’histoire, de la philosophie, de la poésie ? Un peu de tout cela. Kenneth White développe ici son concept de géopoétique. Les définitions sont nombreuses, on retiendra celle-ci : « la création d’une synthèse entre le monde extérieur et soi, soi et le monde extérieur recréés dans un troisième objet qui est une synthèse ». Le philosophe, ancien disciple de Gilles Deleuze, se penche ici sur les questions de la modernité (et sa fin supposée), de l’errance, du nomadisme, mais aussi des lieux, de l’habitat. Se côtoient Stefan Zweig et les penseurs sanskrits, Walt Whitman et Heidegger, Rimbaud et Hölderlin, Marx et Rilke. Plus qu’un étalage stérile, l’érudit éclaire les travaux picturaux de Malevitch à la lumière de Nietzsche et du biologiste D’Arcy Thompson. C’est une affaire de ponts jetés entre divers savoirs et disciplines. Cependant, en s’appuyant sur le rapport à la nature et sur des penseurs, artistes ou philosophes appartenant à l’avant-garde, White n’évoque jamais les rapports sociaux qui traversent, agitent et font avancer le monde. On peut le regretter. Nous étions cependant prévenus : l’Écossais se situe « au large » de l’Histoire.
Thibaut AllemandLet’sMotiv

Dès sa préface, Kenneth White convoque trois manifestations de la pensée qui ont donné à l’humanité — dans le passé et jusqu’à récemment — ses repères : le mythe, la religion et la philosophie. Aucun des trois n’est isolé des autres, et l’histoire de la pensée est pleine de ces mélanges entre mythe et religion, ou entre philosophie et religion. L’essai de White est une réflexion qui part d’une des dernières manifestations de la pensée à l’échelle mondiale : la confiance dans l’Histoire. Liberté, progrès, bonheur — tout nous a été promis. La lucidité oblige à reconnaître que les pensées religieuses à caractère eschatologique, de même que l’historicisme ont échoué et que leurs dernières convulsions continuent à frapper durement. Se refusant à adopter une attitude diogénique qui serait cependant difficile à blâmer, White explore dans son ouvrage « un ensemble de ‘champs’ allant de l’organisation sociale à la composition artistique en passant par l’intelligence chercheuse » afin de répondre au désarroi de la pensée et de l’action contemporaines.
Son analyse de la modernité, entre médiocratie et extrémismes variés, pousse jusqu’à l’os, jusqu’à un terrain radical à partir duquel on pourrait envisager de reprendre pied. Écartant d’emblée les tentatives de ‘réenchantement du monde’ des sociologues post-weberiens, White s’attarde un peu plus sur cet affaissement diffus de la démocratie qu’est la médiocratie. Plus que le gouvernement des médiocres proposé par Alain, ‘médiocratie’ signifie pour White « le stade final d’une dégradation lente » (19) de la démocratie, laquelle bascule vite dans la démagogie puis dans le populisme.

Régis Poulet, « Au-delà des colonnes d’Hercule de la postmodernité (1ere partie)« , La Revue des ressources, (extrait).

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